Entre la stabilisation de l’inflation, un retour à la suffisance des stocks et un effet de rattrapage pour les clients retardataires en renouvellement ou encore, un tourisme en bonne forme, le marché des véhicules neufs a retrouvé des couleurs en 2024, signant toutefois une croissance limitée. Retour sur une année automobile marquée aussi par l’arrivée des marques chinoises et le décollage poussif des véhicules électrifiés…



Comme à son accoutumée et par le biais de son président (sortant), l’Association des importateurs de véhicules neufs (Aivam) a profité de la première semaine du mois de janvier pour tenir sa traditionnelle conférence de presse dédiée au bilan du marché automobile marocain sur l’année fraîchement écoulée. Un exercice auquel se prête toujours avec aisance et brio Adil Bennani, président de l’Aivam dont le mandat (prorogé par 2 fois) expire en mars prochain. Face à la presse, aux représentants des différents membres de l’Association, mais aussi des professionnels des secteurs du financement et de la location automobile, M. Bennani a commencé sa présentation par un aperçu sur le marché automobile mondial.
Retour progressif vers l’avant-Covid
Ce dernier a clôturé l’année 2024 à plus de 88 millions de véhicules, signant une légère croissance (près de 3%) et retrouvant progressivement son niveau d’avant Covid. Malgré cela, la demande est restée faible à l’aune des tensions géopolitiques et d’une inflation tarifaire poussée par l’innovation technologique et le durcissement des réglementations. Par zones, le marché automobile mondial reste tiré par la Chine qui a écoulé plus de 28 millions de véhicules (+4%), suivie par les Etats-Unis avec ses 16 millions d’immatriculations (+2%), puis l’Europe qui a enregistré 11,4 millions de ventes (+1%). Dans ce contexte, les véhicules électriques (VE) ont connu une hausse annuelle de 20% à environ 17 millions de ventes (45% du volume global), boostés principalement par la Chine qui, à elle seule, en a écoulé environ 60% !
Le chiffre à retenir : 176.401
Bien loin de ces chiffres, disons «stratosphériques», le marché automobile marocain a tout de même réalisé une bonne année 2024, atteignant un volume de 176.401 véhicules vendus, toutes catégories confondues (VP et VUL), soit un hausse de 9,2% par rapport à 2023. Autrement dit et à moins de 1.000 véhicules près, le marché a failli battre son record historique de 177.357 ventes atteint en 2018. «Les ventes augmentent aussi bien pour les voitures particulières (VP) que les véhicules utilitaires légers (VUL), soit respectivement +8,1% et +18,8%», souligne l’Aivam dans sa présentation. Plusieurs raisons expliquent ce sursaut et notamment une croissance économique plus élevée que prévue, ainsi qu’un secteur touristique en bonne forme qui a impacté positivement celui de la location courte durée.
L’apport conséquent des loueurs
Or, ce dernier secteur d’activité, à lui seul et plus globalement (loueurs courte et longue durée), a représenté près de 35% du marché avec pas moins de 52.500 véhicules neufs immatriculés l’an dernier. Dans le reste des composantes, le marché du renouvellement des taxis s’est effondré, faute de l’arrêt et du non-renouvellement de la subvention accordée aux taxieurs. Du côté des véhicules d’occasion (VO), on a assisté en 2024 à un retour du VO importé au niveau pré-Covid à environ 14.500 véhicules (+15%), dont une majorité (8.474) âgée de plus de 5 ans, tandis que le nombre de transactions-mutations a dépassé la barre des 725.000 VO.
VP : Dacia, Renault, Hyundai et les autres
Au classement des marques ayant vendu le plus de VP, le podium n’a pas changé par rapport à 2023, puisqu’il est toujours trusté par Dacia avec 39.331 ventes (+16%), suivie par Renault et ses 28.348 nouvelles immatriculations (+7%) et Hyundai qui a pourtant livré moins de véhicules neufs (-13%), soit 13.087 unités. Dans ce top-10, Volkswagen occupe la 5 place avec 10.838 véhicules vendus, mais surtout réalise la meilleure croissance du classement, soit 17%, soit presque deux fois plus vite que le marché. À ce propos, il est intéressant de noter que sur les 41 marques présentes au Maroc (et membres de l’Aivam), le top10 croit moins vite (7%) que le reste du marché (+18%). Logique et normal, puisqu’on a assisté à l’arrivée de nouvelles marques, chinoises notamment. S’agissant de la croissance du VP (+8,2%), «2024 a représenté une année de consolidation des performances dans un contexte de retour à la normale des chaînes d’approvisionnement», commente l’Aivam dans sa présentation.
VUL : croissance double et ventes record
Du côté des VUL, les immatriculations ont bondi de 18,8% (soit 2 fois plus que le VP) à 19.262 unités, avec même un record historique absolu en décembre dernier à 2.224 véhicules. Là encore, l’Aivam explique cette envolée par un «effet rattrapage du VUL poussé par un assainissement des encours du secteur du transport touristique et une croissance du transport du personnel», mais aussi une «résilience par rapport au contexte et vieillissement du parc ayant ramené les clients progressivement à renouveler». Dans le VUL, Renault domine toujours avec 4.651 ventes et 24,1% de part de marché, suivie par Ford (2.547/13,2%) et Fiat (2.146/11,1%), ces deux dernières marques ayant progressé au classement au détriment de DFSK qui a plongé (-22%) à 1.968 VUL vendus.
Les segments les plus prisés
Par segments de véhicules, le marché du VP reste essentiellement soutenu par deux architectures de véhicules : les citadines et des SUV qui connaissent des croissances à 2 chiffres et réalisent 76% des ventes VP ! Vient ensuite le segment des ludospaces qui totalise 11,1% des ventes seulement, soit un fort repli (-19.8%) et ce, du fait de l’arrêt des ventes du Dacia Lodgy. Le reste du marché VP est réalisé par les compactes (6,4%), les micro-citadines (3%) et les routières (1,4%). Dans le VUL, tous les sous-segments sont en croissance et c’est toujours le pick-up qui réalise le gros des immatriculations (43%), suivi par le large van (34%). À ce sujet, l’Aivam explique que «le segment des pick-up reflète la reprise des activités de services» et non le secteur agricole ou la sécheresse sévit toujours. Enfin, par villes, Casablanca reste en tête des immatriculations neuves (41% des ventes), suivie par Rabat (10,9%) et désormais Agadir (7,3%), tandis que Tanger signe la plus forte croissance (+15,1%).
Audi, toujours champion du premium
Dans le segment VP qui constitue la colonne vertébrale du marché (157.139), les ventes de voitures premium ont atteint 16.606 unités, soit une PDM (VP) de 10,6%, avec surtout, une électrification plus concentrée, puisque 9,7% des ventes ont des autos électrifiées (BEV, hybrides et PHEV). Or, cette part n’était que de 7,3% en 2023. Dans ce club des labels chics, Audi conserve son leadership pour la 3ème année consécutive avec 4.663 ventes (un record historique), devant BMW (4.452) et Mercedes-Benz (3.033), alors que Porsche (7ème) signe la plus forte croissance (+48,4%), avec 619 ventes en 2024. Dans ce registre, des marques comme Volvo et Mini, voient leurs ventes reculer à respectivement -12,9% et -13,9%, du fait de la fin du diesel dans leurs gammes.
L’électrification est en marche… lente
Maintenant si l’on analyse un peu le marché des véhicules à énergie alternative dans tout le marché, leur part demeure faible à 6,3% contre 58% en Union Européenne. Sur les 11.134 ventes de véhicules verts, livrés par 18 marques proposant une quarantaine de modèles, 8.190 véhicules sont hybrides, 1.819 sont hybrides rechargeables (PHEV) et seulement 1.125 sont 100% électriques. L’Aivam souligne une tendance à la baisse de la part du diesel (81%) au profit de l’essence (18,8%) et des énergies alternatives (0,6%). Dans le marché des hybrides, la marque Toyota domine toujours, suivie par Hyundai et Renault. Dans celui des hybrides rechargeables, BYD arrive en tête, boostée par son best-seller (le SUV Seal U), suivie par Land Rover qui est talonnée de près par BMW. Enfin du côtés des 100% électriques (ou BEV), Dacia domine grâce à sa Spring, suivie par BYD et Volvo.
Une croissance mesurée en 2025
Enfin, un focus sur le profil de l’acheteur a été fait et notamment sur le volet du financement automobile où l’on note que le crédit a réalisé 57,6% des ventes, soit une hausse de 17% par rapport à 2023. Au passage, on retiendra que la présentation de ce bilan automobile annuel a vu, une année de plus, la présence de Benacer Boulaajoul, DG de la NARSA, qui reste un partenaire privilégié de l’Aivam. Quant à l’année 2025, elle s’annonce sous de bons auspices avec un marché qui pourrait atteindre le cap des 185.000 ventes, soit une croissance mesurée de 5%, comme l’estime Adil Bennani. Selon le président de l’Aivam, le tourisme devrait continuer à alimenter la demande sur le neuf, tout comme les 100 milliards de dirhams récoltés à travers la récente amnistie fiscale qui seront injectés dans l’économie réelle et qui devraient avoir un effet positif sur la croissance du marché.